Retour à Éditos

Aidant proche : une fonction d’avenir ?

Aidant proche : une fonction d’avenir ? © M. Cornélis

Derrière le vocable "aidant proche", se cache une multitude d'attentions. Le terme de plus en plus répandu recouvre des réalités certes fort différentes mais porteuses d'enjeux très importants. Décodage.


Rester auprès d’un enfant malade, quelques heures, un jour… Accueillir son père ou sa mère à la maison pour un court moment… Accompagner sur la durée un proche… L'aider à faire ses courses, à se déplacer vers l’hôpital, à se nourrir, à se laver… Tant de petits services rendus au quotidien qui ont tendance à s'accroître avec la dépendance de nos proches.

Une réalité à ne pas oublier

Le maintien à domicile est certainement un des plus grands enjeux auxquels notre société devra faire face dans les années qui viennent. Le célèbre "papy boom" n'a pas encore montré tous ses effets. D’ici à 2050, le nombre de personne de plus 85 ans s'élèvera à 500.000. Il était de 180.000 au passage du millénaire. Où habiteront-ils ? Il semble clair qu’il ne sera pas possible de développer suffisamment de places en maisons de repos et de soins pour l'ensemble de ces seniors.

Aujourd'hui déjà, l'hébergement dans ce type de structures – pas toujours accessibles financièrement – ne constitue pas l'unique solution aux personnes vieillissantes. Rester chez soi est – et doit absolument rester – une perspective réaliste. Assurément, elle ne peut s'envisager qu'à une condition : celle d’être aidé. Que ce soit par des services professionnels (en soins infirmiers ou d'aide à domicile) ou par des proches. L’idéal se trouve même dans une bonne articulation entre ces deux accompagnements : professionnels et aidants proches.

De cette manière, l’aidant ou les aidants ne portent pas en solo la charge de leur proche dépendant. Une forme de relais peut s'organiser de façon structurée et structurante autour de la personne aidée, tout en ménageant les forces des aidants. Car le risque de surcharge guette souvent. Et il y a lieu d'éviter qu'à leur tour, les aidants soient entraînés dans la dépendance. Si des dispositifs de "répit" se développent, l’enjeu est aussi certainement de ne pas enfermer les personnes dans un rôle, mais de permettre une relative flexibilité dans l'engagement autour du proche souffrant.

Un statut ?

S'il n'y a pas encore de reconnaissance formelle de l'aidant proche, un arrêté royal ne saurait tarder à ce propos. Bonne nouvelle certes. Mais il reste des points d’attention à garder à l'oeil. Garantir un minimum de droits aux personnes qui aident un proche est une excellente chose. Cependant, veillons à ne pas les enfermer par de longues procédures dans des démarches administratives décourageantes, à ne pas les assaillir de demandes d'attestation, à ne pas les contraindre par des heures minimales à prester...

L’enjeu, autour de ce statut, est surtout de maintenir les droits sociaux des aidants – majoritairement des femmes – et d’éviter que le soutien à un proche malade ne soit préjudiciable sur la suite de la carrière ou la pension de l' aidant. Ce serait rater l'objectif que de mener à une précarisation accrue - des aidantes en particulier.

La question du temps disponible pour un aidant est cruciale dans ce débat. Un statut pour un statut n’a que peu de sens s'il ne peut s'accompagner de dispositions permettant de libérer de l'espace-temps au profit de la personne aidée. Maintenir – voire renforcer – les possibilités d'adapter le temps de travail des aidants proches est crucial.

Parallèlement, inciter les aidants à fonctionner en réseau, faire de ce statut la clé de voûte de ce réseau, cela permettra alors peut être de réellement prendre en considération la place des aidants proches.

Et les professionnels dans tout ça ?

Cette nouvelle reconnaissance des aidants proches ne doit pas dédouaner les professionnels de l’aide et des soins à domicile. C’est en grande partie leur rôle que d'assurer la mise en réseau, d'évoluer dans un esprit de collaboration entre professionnels et aidants proches. Travailler en équipe autour du patient, veiller à ce que l’aidant ne soit pas débordé, apporter des solutions en collaboration avec les proches et la personne dépendante…, autant de préoccupations auxquelles les professionnels de l'aide à domicile se doivent de veiller.

Les mutualités, quant à elles, auront demain plus que probablement un rôle à jouer dans le processus de reconnaissance des aidants proches. Tous les acteurs de la mutualité ou proches de celle-ci doivent donc dès aujourd’hui s’adapter à ces nouvelles réalités : le service social, les mouvements – Enéo et Altéo en particulier –, tout le monde à un rôle à jouer vis-à-vis de ce "nouveau" public.

En effet, le service social sera plus que probablement en première ligne dans l’accompagnement des aidants, et il fera aussi le lien avec les professionnels. Enéo et Altéo auront également l’occasion de former les aidants proches, de les rencontrer, d’organiser des lieux d’échanges… C’est pour cela que nous avons d'ores et déjà créé, au sein de la Mutualité chrétienne, la commission "aidant proche". Elle travaille d’arrache-pied dans le but de faire valoir les points de vues de la MC, au niveau politique : un congé "aidant proche" à proprement parler, une reconnaissance qui permette de conserver ses droits, une formation et une attention particulière de la part des professionnels envers les aidants.

Du 5 au 11 octobre, un coup de projecteur sera mis en Wallonie et à Bruxelles sur les aidants proches. Des ateliers bien-être, des cafés "aidants proches", des ciné-débats, des groupes de paroles … constitueront un moment privilégié pour les aidants "leur permettant un moment de répit, de partage, de dialogue voire de plaisir"(1). La MC et ses partenaires y pren nent part activement. En cette semaine des aidants proches, soyons particulièrement ambitieux pour eux et pour les personnes dépendantes qu'ils accompagnent.