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Le tiers-payant, une avancée sociale

Le tiers-payant, une avancée sociale Jean Hermesse
© Matthieu Cornélis

La ministre fédérale des Affaires sociales et de la Santé, Maggie De Block, veut rendre les soins de première ligne plus accessibles. Au 1er juillet, toutes les consultations chez les médecins généralistes pour les patients à faibles revenus seront en principe directement remboursées par la mutualité au médecin. Ce dispositif de tiers-payant social obligatoire est une vraie avancée. Pourtant une partie du corps médical est réticente.


Le gouvernement précédent avait décidé d’étendre le tiers-payant obligatoire à tous les soins ambulatoires pour les patients à faibles revenus (Bim : bénéficiaires de l’intervention majorée) et les malades chroniques, et ce à partir du 1er janvier 2015. Ces patients ne payeraient donc plus que le ticket modérateur, la mutualité remboursant directement le prestataire de soins. Une des premières mesures prises par le nouveau gouvernement a été de revoir et de limiter cette extension aux seules consultations chez le médecin généraliste et non plus à tous les soins ambulatoires tel qu'initialement prévu. Aussi, les malades chroniques ne sont plus concernés et la date d’entrée en vigueur est reportée au 1er juillet 2015. Les projets d’amélioration de l’accès aux soins ont donc été sérieusement rabotés. Malgré cela, une partie du corps médical reste opposée à cette extension, même limitée, du tiers-payant obligatoire.

Le tiers-payant rend les soins accessibles

De manière générale, la plupart des soins sont remboursés directement aux prestataires: les soins hospitaliers, les soins infirmiers à domicile, les soins en maisons de repos, les analyses de biologie clinique, les examens de radiologie… Pour tous ces actes médicaux, le patient ne paye de sa poche que le ticket modérateur et parfois des suppléments. Ce système permet aux patients de ne pas devoir avancer l’argent pour des soins coûteux. Sans cela, nombre de patients renonceraient à se soigner, les prestataires éprouveraient des difficultés à être payés. Plus de 85% des coûts des soins de santé sont directement payés par la mutualité aux prestataires. Certains soins ambulatoires, entre autres les consultations et les visites des médecins généralistes à domicile, ne sont toutefois pas remboursés directement aux prestataires, sauf pour les patients à faibles revenus (Bim). En raison de leurs faibles revenus, et pour éviter que le coût soit une barrière d’accès aux soins, le médecin peut appliquer (il n'est pas obligé) le tiers-payant pour ces patients. La différence est importante ! Soit ces patients ne payent que le ticket modérateur, un euro (si le patient a un DMG), et le médecin envoie lui-même l’attestation de soins directement à la mutualité qui le rembourse ; soit ils payent le prix plein de la consultation, 24,5 euros, reçoivent l’attestation de soins et se font rembourser plus tard par la mutualité. Avancer ou non le montant de la consultation fait la différence.

L’accès aux soins reste pourtant problématique

Malgré ce dispositif du tiers-payant et l'engagement pris en Commission médico-mutualiste de l'encourager, malgré des efforts de simplification administrative, on constate aujourd’hui qu’à peine la moitié des consultations pour les patients à faibles revenus sont facturées selon ce système. Pourtant, l’enquête de 2013 sur la santé des Belges révèle que 9% des Wallons renoncent ou reportent des soins à cause du coût. À Bruxelles, ce pourcentage atteint même 22% ! Conséquence : le report des soins de base risque, in fine, de coûter plus cher en soins plus complexes. L’accès aux soins reste donc bien problématique pour une partie importante de la population. Étendre le tiers-payant aux consultations de médecine générale pour les personnes à faibles revenus, soit deux millions de personnes, c'est améliorer l’accès aux soins. Mais aujourd'hui, près de 30% des médecins généralistes ne le proposent pas à cette catégorie de patients.

La complexité administrative, une fausse excuse

Soucieuses de réduire les charges administratives, et donc de faciliter le tiers-payant, les mutualités ont développé et investi ensemble dans de nouveaux moyens informatiques de communication. Grâce à un réseau sécurisé reliant les mutualités et tous les prestataires, ces derniers peuvent vérifier en ligne les droits des patients, leur statut… Ce réseau a aussi permis la suppression de la carte SIS. Dès lors, en pharmacie, la lecture de la carte d’identité électronique suffit et permet de se connecter au réseau intermutualiste de manière fiable et rapide. Au cours du seul mois de mars, ce réseau a été consulté plus de trois millions de fois pour vérifier les droits des patients. Grâce à ce réseau et à l'usage de la carte d’identité, on réduit aussi fortement les risques de fraude (par exemple: sur l'identité des personnes, sur la facturation de prestations non réalisées). Prochainement, les médecins généralistes pourront facturer les consultations en tierspayant de manière électronique, les attestations papier seront supprimées et honorées dans les 15 jours. Ils devront aussi remettre un reçu au patient et communiquer toutes les informations à la mutualité, tel que l'impose la loi sur la transparence. La facturation électronique remplacera progressivement les attestations papier, bien qu'il soit nécessaire de laisser un temps suffisant (on parle de deux ans), pour que les firmes de logiciels s’adaptent à ces nouvelles modalités et que patients et médecins les apprivoisent. La complexité administrative devrait se voir simplifiée grâce à ces développements informatiques, ils faciliteront l'application du tiers-payant.

Trop de patients à faibles revenus renoncent à des soins de base à cause du coût. Avec le tiers-payant, il est possible de lever la barrière financière. La Mutualité chrétienne est favorable à rendre le tiers-payant obligatoire pour les consultations chez le médecin généraliste et rendre ainsi les soins plus accessibles pour les patients à faibles revenus. Ensemble, avec toutes les mutualités, nous nous engageons pour simplifier les procédures administratives au bénéfice des prestataires et des patients.