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Et si on (re)faisait mouvement… ?

Et si on (re)faisait mouvement… ? Elisabeth Degryse © Matthieu Cornélis

"Les temps sont durs". "Drôle de période". "Pas facile d’être positif…" Voilà sans doute les formules que nous entendons régulièrement autour de nous. Plutôt que de nous limiter à le constater amèrement, pourquoi ne pas nous attacher à recréer du vivre ensemble.


C’est vrai. L’atmosphère générale n’est pas des plus radieuses. L’austérité, la crise financière, la concertation sociale tendue, les perspectives maussades…, le terreau est fertile pour faire vivre et promouvoir l’individualisme, l’isolement, le repli sur soi. Peut-être est-ce aussi la solution de facilité ? Celle qui nécessite de notre part le moins d’énergie et d’investissement ? Sans doute aussi amène-t-elle à nous déresponsabiliser… : "ce n’est pas nous" ; "c’est le politique" ; "ce sont les choix financiers" ou encore "le monde va mal". Au final, "on n'y peut rien".

Les échanges du passé

Il n’y a pas si longtemps, pour échanger et défendre des projets de société, une multitude de lieux existaient. Depuis les caisses d’assistance mutuelle jusqu'aux paroisses, les échanges pouvaient avoir lieu. Des projets d’un meilleur lendemain pouvaient y voir le jour…

Avec le temps, les métiers mutualistes se sont professionnalisés, ce qui a eu pour conséquence, certainement involontaire, le désinvestissement de certains bénévoles. Leur rôle s'est modifié, tandis que les con train tes de gestion de plus en plus importantes ont parfois éloigné les mutualités de l’essentiel : le con tact avec les membres, le "terrain" comme on dit... En outre, ne soyons pas naïfs, de nombreux membres de la mutualité n’attendent de nous que des services de qualité et pas nécessairement un positionnement politique ou la construction d'un projet de société.

L’arrivée des nouvelles technologies, l’informatisation grandissante de nombreux foyers, le "tout, tout de suite" ne sont pas pour rien non plus dans le détricotage des relations et du vivre ensemble. Les réseaux sociaux n’ont de "réseau" que le nom… Chacun derrière son écran, et plus personne n’est en vraie relation. La mise en avant constante sur la Toile des moments de vie positifs des uns et des autres ne renvoie qu’une image tronquée de la réalité. Elle nous pousse encore plus dans nos retranchements. L’illusion de la relation remplace la réalité. Et l’isolement n’en est que plus grand…

Quelle responsabilité avons-nous à porter? Comment faire face ? Comment arrêter ce train qui semble lancé à toute vitesse ? Comment redonner du sens ?

Permettre les rencontres dès le plus jeune âge

La clé réside certainement pour partie dans la nécessité de (re)faire mouvement. Il est important de retisser du lien, de sortir de notre isolement, de permettre les rencontres. Cet enjeu est fondamental pour notre vivre ensemble, d’aujourd’hui et de demain.

Nous nous devons d’être et de rester vigilants. Et pas seulement aux grandes orientations politiques. Car défendre un meilleur vivre ensemble se joue parfois sur des détails. La dernière prise de position de la NVA au sujet de l’accessibilité des crèches – souhaitant les réserver aux enfants de travailleurs - est à ce titre très interpellante. Si, dans les lieux d’éducation, nous en arrivons à fermer les portes de la mixité, qu’elle soit sociale, culturelle ou basée sur l’activité des parents, nous privons les jeunes générations dès le commencement de leur parcours - ainsi que leurs parents - de l'échange, du lien social et de la construction d’un avenir commun..

Faire mouvement en réponse à…

L’importance de se retrouver et d’échanger peut aussi être envisagée comme la bonne réponse à l’obscurantisme et aux extrémismes. Les réponses autoritaires et sécuritaires sont sans doute en partie nécessaires, mais ne peuvent se suffire à elles-mêmes. L’enjeu de l’éducation et de la tolérance doit être défendu et travaillé également. Si demain, les lieux culturels et d’éducation prennent peur, s’autocensurent ou arrêtent de fonctionner, alors notre société courra un vrai risque. Celui de s’enfermer et de ne plus oser échanger et débattre, celui de ne plus pouvoir informer et provoquer le débat.

Face à ces dangers, la mutualité a un rôle à jouer. Les valeurs qui soutiennent son action doivent se répandre et faire tache d’huile. La solidarité, la concertation, la démocratie de nos instances toujours en débat et en perpétuelle évolution sont de belles plus-values qui méritent d’être portées à l’extérieur.

Les mouvements partenaires de la MC sont aujourd’hui plus qu’hier encore des lieux à investir et à soutenir. Dans ce numéro d'En Marche, ils affichent une partie de leurs activités, avec les projets de séjours. L’occasion peut être de rappeler le moment privilégié que sont ces séjours pour y vivre pleinement les valeurs d’engagement, de participation et de solidarité qui sont les nôtres !