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On ne joue pas avec l'accessibilité des soins           

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Déconventionnement et pénurie mette l'accès aux soins sous pression (c) photo Adobe
Déconventionnement et pénurie mette l'accès aux soins sous pression (c) photo Adobe
Elisabeth Degryse

Elisabeth Degryse

Ce mois de janvier n’a pas manqué de piment en matière de soins de santé. Le principal syndicat de médecins, l’Absym, a menacé de dénoncer l’accord médico-mutualiste qui vise à assurer la sécurité tarifaire des prestations auprès des patients grâce au mécanisme du conventionnement. Si un accord a finalement pu être trouvé entre les syndicats de médecins, les mutualités et le ministre de la Santé, cela montre combien l’accessibilité aux soins, même en période de crise, reste sous tension tant sur son principe que sur le terrain. 

29 % des spécialistes rencontrés par nos membres en 2021 n’étaient pas conventionnés. Dans certaines disciplines ce pourcentage dépasse un praticien sur deux

La sécurité tarifaire constitue le premier levier de l’accessibilité aux soins de santé. Chaque année (ou maximum tous les deux ans), les représentants des prestataires de soins et les mutualités négocient ce que l'on nomme "l'accord médico-mutualiste"  (chaque secteur de soins dispose de son accord : médico-mutualiste avec les médecins, dento-mutualiste pour les dentistes, etc.) qui définit les différents honoraires et/ou tarifs des prestations et les niveaux de remboursement selon les profils de patients (BIM, catégories d’âge, etc.…). L'accord médico-mutualiste traite aussi du statut social, et donc d'avantages sociaux, pour les prestataires. Une des conditions pour en bénéficier est d'adhérer à l'accord.  En effet, l'accord n'est pas contraignant. En vertu du principe de la médecine libérale, qui prévaut dans notre pays, chaque prestataire a le choix d’y participer ou non. En cas d’adhésion, le médecin est dit conventionné. Il s’engage à respecter les tarifs officiels fixés par l’Inami. En cas de refus, le médecin est dit déconventionné et peut demander des suppléments au patient. Reste le médecin partiellement conventionné, qui applique le tarif conventionné uniquement certains jours et à certaines heures.  

Le conventionnement à l’épreuve du terrain  


Si ces accords constituent le socle pour assurer une sécurité tarifaire pour les patients, nous constatons et déplorons de fortes disparités géographiques sur le terrain.  En effet, alors qu’en médecine générale, nous pouvons nous réjouir d’avoir près de 9 médecins sur 10 conventionnés, dans certaines localités (comme à Thuin), certains arrondissements (comme Neufchâteau), certaines provinces (comme le Brabant wallon) ou certaines Régions (comme Bruxelles), le pourcentage de médecins non conventionnés est supérieur à 30 % (source : agence Intermutualiste).


Le taux de conventionnement des spécialistes reste également insuffisant.  Selon nos données de remboursement, 29 % des spécialistes rencontrés par nos membres en 2021 n’étaient pas conventionnés. Dans certaines disciplines ce pourcentage dépasse un praticien sur deux : 77 % pour l’ophtalmologie, 83 % pour la dermatologie/vénérologie, 79 % pour l’anatomie pathologique, 65 % pour la chirurgie orthopédique, etc.  Ici aussi, les disparités géographiques en matière de conventionnement creusent les inégalités. Selon le rapport de l’agence Intermutualiste, à Charleroi, Namur, Verviers, on ne trouve plus d’ophtalmologues conventionnés. En Flandre, ce sont les dentistes conventionnés qui sont devenus très rares. En province de Luxembourg et du Brabant wallon, les gynécologues...

L’accessibilité sous toutes ses formes 


Outre la problématique de l’accessibilité financière et géographique, force est de constater qu’en raison à la fois d’une pénurie tant en médecine générale, dans le corps soignant que dans certaines spécialités, les délais deviennent problématiques pour obtenir un rendez-vous, que ce soit avec son médecin traitant ou avec un spécialiste. Au point que des médecins spécialistes en hôpital, conventionnés, au nom d’une prise en charge plus rapide, proposent un rendez-vous en cabinet médical privé mais au tarif non conventionné (c’est-à-dire avec des suppléments d’honoraires), induisant de facto une médecine à deux vitesses. 
Autant de réalités, et bien d’autres, qui fragilisent l’accessibilité pour tous à des soins de qualité. Réalités que nous relayons, pour trouver des solutions, au sein des travaux permanents (entre le Cabinet du ministre de la Santé, l’Inami, les représentants des prestataires, les gestionnaires d’institutions de soins et les mutualités) relatifs aux projets de réformes en cours en médecine générale, en matière d’hôpitaux ou de soins intégrés par exemple. 


Autant de chantiers en 2023 sur lesquels la MC, au départ de ses valeurs et de son histoire, se veut être, d’une part, porte-voix des besoins des membres affiliés et de la population en général et, d’autre part, force propositionnelle et orientée solutions grâce à l’expérience et l’expertise de ses collaborateurs. 

EN SAVOIR +
Pour trouver un médecin conventionné proche de chez vous :  mc.be 
En apprendre davantage sur le conventionnement (données par région, spécialité, etc.) : aim-ima.be