Vivre ensemble

Climat : des fruitiers dans la ville

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Pour le paysagiste Pierre Lacroix, produire des fruits en ville, c’est aller vers plus d’autonomie alimentaire et donc de résilience. <br />
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Pour le paysagiste Pierre Lacroix, produire des fruits en ville, c’est aller vers plus d’autonomie alimentaire et donc de résilience.
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Valentine De Muylder

Valentine De Muylder

La rue baron Guillaume van Hamme, à Uccle, est une petite allée bordée d’arbres et arbustes fruitiers plutôt étonnants : néfliers, amandiers, abricotiers, argousiers, noisetiers de Byzance…  Ils ont été plantés là il y a quelques mois, dans le cadre du projet de recherche ARBRES, qui a pour objectif de comprendre comment l’arbre fruitier peut augmenter la résilience de Bruxelles face aux conséquences du changement climatique.  "Cette rue est un des nombreux espaces d’expérimentations, ou living labs, du projet", explique Pierre Lacroix. Paysagiste au Centre d’écologie urbaine, il est un des accompagnateurs de la recherche, financée par Innoviris et menée par une équipe de chercheuses travaillant au sein de trois administrations : les communes d’Uccle et de Forest, et Bruxelles Environnement. 

"Pas de compote sur ma voiture" 

"La recherche se fait dans l’action, sur le terrain, en impliquant les personnes concernées", continue-t-il. Lors de la rénovation par la commune de la rue baron Guillaume van Hamme, les riverains ont ainsi pu participer à la sélection des fruitiers qui ont été plantés.  "Il s’agit de sortir du classique pomme-poire-prune-cerise, car il existe des centaines d’arbres et arbustes fruitiers adaptés à nos climats, et de voir lesquels sont compatibles avec une plantation en rue." Car la rue est un environnement spécifique, avec des côtés qui sont exposés à la lumière et d’autres moins, des façades qui réverbèrent de la chaleur, une qualité de sol en général inférieure, parfois un couloir de vent 

Chaque fruitier a également ses avantages et ses inconvénients (en termes d’allergies, de propreté…), que le projet entend testerMais les craintes à ce sujet ne sont pas toujours fondées, précise Pierre Lacroix : "Dans le cadre de nos expérimentations, nous avons pu identifier qu’il y avait beaucoup de représentations sociales positives et négatives liées aux arbres fruitiers." Certaines peurs reviennent souvent: "Je ne veux pas de compote sur ma voiture", "Si des fruits tombent par terre, cela va attirer des abeilles qui vont nous piquer" 

 

Pour le paysagiste Pierre Lacroix, produire des fruits en ville, c’est aller vers plus d’autonomie alimentaire et donc de résilience.

De nombreux "services écosystémiques" 

En ville, les arbres rendent de nombreux "services écosystémiques", dont des services de régulation (en cas de pluie abondante, de canicule…), de production (bois, etc.) ou culturels (promotion de la santé, réduction du stress…). "Des arbres en bonne santé, dans un bon environnement, permettent d’atténuer les effets du changement climatique, à toute petite échelle, ainsi que de s’y adapter, affirme Pierre Lacroix. Produire des fruits en ville, c’est aller vers plus d’autonomie alimentaire et donc de résilience." 

Un autre élément crucial lorsqu’on parle des arbres à l’heure actuelle, c’est leur diversité :"Tous les arbres ne sont pas adaptés au changement climatique. Donc plus il y a de diversité, plus on sera résilient si une espèce d’arbre n’est pas adaptée au climat de demain, ou est touchée par une maladieEn ville, les fruitiers peuvent participer à cette nécessaire diversification. Mais cet enjeu concerne tous les arbres et des recherchesont également en cours pour savoir quels arbres planter dans nos forêts afin de les rendre plus résistantes.  

D’autres living labs (parcs, rues, vergers urbainsservent de terrain de recherche au projet ARBRES, qui en est à sa troisième et dernière annéeEn 2024, il livrera ses fruits sous la forme d’outils destinés à aider administrations, monde politique et grand public à sélectionner, gérer et entretenir les fruitiers en ville, et à les intégrer dans les stratégies d’avenir.