Droits sociaux

"Femmes et institutions : jouons la collaboration"

3 min.
Aurelia Jane Lee

Aurelia Jane Lee

Les femmes sont en contact quotidiennement avec différentes institutions : de l'école à la commune, en passant par l'hôpital, le CPAS, le Forem/Actiris… Elles leurs sont essentielles pour organiser leur existence et exercer leurs droits. Leurs rapports avec ces institutions ne sont toutefois pas toujours simples. Dans les lieux de parole de Vie Féminine, les femmes évoquent régulièrement les difficultés qu'elles rencontrent. Ce constat a motivé la mise en oeuvre d'une vaste campagne. "Notre volonté est que nos institutions, auxquelles nous croyons, puissent mieux comprendre qui sont ces femmes, quels sont leurs réels besoins et comment faire en sorte d'y répondre de manière efficace et pertinente dans le contexte de crises multiples que nous traversons", explique Laetitia Genin, coordinatrice nationale du mouvement.

Vie Féminine a à coeur d'entendre toutes les femmes, y compris celles à qui l'on donne moins la parole : les femmes sans domicile fixe ou sans papiers, par exemple…

Si, dans un premier temps, la démarche consiste à récolter les témoignages des femmes, le but ultime est d'engager un dialogue avec les institutions. "Nous travaillons avec un public particulièrement concerné par les institutions et avec lequel nous avons pu construire une relation de confiance. Les femmes nous livrent des choses qu'elles n'osent pas, pour différentes raisons, livrer aux institutions." Vie Féminine entend porter ces témoignages à la connaissance des institutions, pour réfléchir avec elles à améliorer les pratiques existantes ou à en créer de nouvelles.

Des institutions trop peu sollicitées

"Certaines femmes ne sollicitent pas ou plus les institutions, déplore Laetitia Genin. Du même coup, elles n'activent pas ou plus leurs droits." Cela peut être parce qu'elles n'ont simplement pas connaissance de leur existence. Le Secal, le service qui accompagne le paiement ou le non-paiement des créances alimentaires, est un bon exemple.

D'autres institutions sont bien connues, mais leur fonctionnement reste trop complexe, ou le public ignore pourquoi et comment y faire appel. "Il ne suffit pas de renvoyer vers un site internet ou d'éditer une brochure, souligne Laetitia Genin. On sait qu'avec ce type de communication, on perd une partie du public, parce que tout le monde n'est pas outillé, n'a pas la connexion internet suffisante, ou parce que pour certains, le terme 'application' n'évoque rien."

Enfin, la peur explique aussi le non-recours à certaines institutions. "Des femmes nous ont déjà confié qu'elles ont peur de mentionner la situation de précarité dans laquelle elles se trouvent parce que cela pourrait avoir un impact direct sur la garde de leurs enfants par exemple, signale Laetitia Genin. Nous avons besoin d'institutions à l'égard desquelles on éprouve de la confiance."

À la rencontre d'un public varié

Débutée en 2022, la campagne se poursuivra tout au long de 2023, à travers l'organisation de rencontres et de stands d'échange. "Nous avons toutes une parole pertinente, une expertise sur notre propre vécu avec les institutions. Cela peut être une anecdote qui s'est jouée à la commune, à l'hôpital… ou un compte-rendu plus dense, détaille
Laetitia Genin. Les témoignages peuvent être individuels ou collectifs. Nous proposons d'ailleurs des rencontres pour que les femmes puissent entendre d'autres récits et s'alimenter les unes les autres".

Vie Féminine a à coeur d'entendre toutes les femmes, y compris celles à qui l'on donne moins la parole : les femmes sans domicile fixe ou sans papiers, par exemple, ou les femmes exposées à de multiples sources de discrimination et de précarité, particulièrement concernées par cette question de l'accessibilité des institutions. Pour toucher ce public, le mouvement collabore avec des centres de la Croix-Rouge ou des associations de soutien aux familles monoparentales par exemple.

Vous souhaitez apporter votre témoignage à Vie Féminine ?
"Il y aura différentes portes d'entrée pour pouvoir témoigner, avec une garantie totale d'anonymat, assure Laetitia Genin. Ce qui est recherché ici, ce n'est pas de savoir que c'est Leïla, Jacqueline ou Mireille qui a témoigné, mais plutôt le vécu, l'analyse que l'on peut porter sur ce vécu et au regard de cela, les pistes de solutions que l'on pourrait suggérer toutes ensemble."
Si l'essentiel de la campagne se déroulera sur le terrain (Vie Féminine est présent partout en Fédération Wallonie-Bruxelles, aussi bien dans les zones urbaines que rurales), le mouvement propose aussi un questionnaire accessible en ligne, sur son site internet — viefeminine.be. "Les lieux physiques sont à privilégier, car l'aspect collectif est toujours très moteur, mais c'est une alternative pour celles qui préfèrent livrer un témoignage écrit."