Vie sexuelle et affective

Enfin une réforme du droit pénal sexuel!

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Candice Leblanc

Candice Leblanc

Il est temps de dépoussiérer le droit pénal, notamment en matière d’infractions sexuelles. En effet, sur ces questions, le Code actuel date de… 1867 ! Avec des notions dictées par le patriarcat de l'époque et un vocabulaire désuet – "outrage aux bonnes mœurs", "corruption de la jeunesse", "attentat à la pudeur", etc. – il tient peu compte des évolutions de la société ni de l’expérience traumatique et des souffrances des victimes. La réforme entend moderniser le Code pénal sexuel : de crimes et délits contre "l’ordre des familles" et la moralité publique, on passe aux infractions contre la personne.

1. Le consentement comme principe de base. Le Code pénal actuel ne considère l’agression sexuelle sur une personne majeure qu’en cas de contrainte ou de violence. Ce qui ignore le phénomène de sidération qui "paralyse" nombre de victimes ou un état d’inconscience, par exemple. Le consentement est non seulement défini dans la nouvelle loi, mais il est aussi au centre de celle-ci. Désormais, si un acte sexuel n’est pas consenti de façon libre et éclairé, celui-ci pourra être qualifié d’agression sexuelle.   

2. Des peines plus lourdes et plus variées. Le viol sera puni de 15 à 20 ans de prison – contre 5 à 10 ans aujourd’hui. Les juges disposeront aussi d’un arsenal de sanctions plus complet et plus varié, notamment au terme de la peine de prison (obligation de suivi thérapeutique, interdiction d’approcher la victime, etc.) et pour les autres délits sexuels : bracelet électronique, travaux d’intérêt général, etc.

3. Une série de circonstances aggravantes feront l’objet d’un alourdissement de la peine de prison. Il s’agit de :

  • l’inceste (enfin inscrit et reconnu dans la loi !),
  • l’agression sexuelle commise par un (ex-) partenaire ou par une personne en position d’autorité par rapport à la victime,
  • avec l'aide ou en présence de plusieurs personnes,
  • pour motif discriminatoire (homosexualité, transidentité, convictions religieuses ou politiques, "crime d'honneur", etc.),
  • en cas de menace ou d’administration de substances inhibitives (le GHB, la fameuse "drogue du viol", par exemple),
  • si la victime a moins de 14 ans ou se trouve en situation vulnérable (infirmité, déficience physique ou mentale, etc.).

4. La majorité sexuelle reste fixée à 16 ans. Il y aura toutefois une tolérance en cas d’acte sexuel consenti par une personne de plus de 14 ans et si la différence d’âge avec le ou la partenaire est de maximum 3 ans.  

5. Le travail sexuel est décriminalisé. Jusqu’ici, la prostitution faisait l’objet d’une certaine tolérance, mais les travailleurs et travailleuses du sexe ne bénéficiaient d’aucune reconnaissance juridique. En décriminalisant leurs activités, la réforme ouvre la voie à un futur cadre juridico-social – y compris une protection sociale, comme pour n'importe quel emploi – pour les personnes concernées. La Belgique devient ainsi le premier pays européen à légaliser le travail sexuel des majeurs. En revanche, la prostitution des mineurs et le proxénétisme restent interdits.

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Déposer plainte pour violences intrafamiliales   

Ce nouveau code pénal sexuel devrait entrer en vigueur le 1er juin. Reste à savoir quels moyens seront débloqués pour qu'il soit correctement appliqué… et s'il le sera. À l'heure actuelle, moins d'une plainte pour viol sur dix aboutit à une condamnation. La lutte contre les violences sexuelles – qui visent à 93% des femmes et des filles – est loin d'être gagnée…

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