Prévention

Sous le soleil, (très) modérément

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Philippe Lamotte

Philippe Lamotte

"L'évolution est alarmante. La Belgique a un problème avec le cancer de la peau."

Le ton est donné. Le docteur Thomas Maselis, président de l'ASBL Euromelanoma Belgique, tire la sonnette d'alarme. Vingt ans après avoir créé ce réseau international de dermatologues présent aujourd'hui dans 33 pays, le spécialiste et ses cinq collègues belges s'inquiètent spécifiquement de la progression du cancer de la peau dans notre pays. Pour appuyer leur constat et leur appel à réagir, ils soulignent plusieurs chiffres tirés de la Fondation Registre du Cancer.

D'abord, sur le plan humain. Chaque année, 37.000 personnes, dans notre pays, sont victimes pour la première fois d'un cancer de la peau. Tous ne sont pas mortels, loin s'en faut. Mais cette forme de cancer est clairement l'une des plus courantes en Belgique et, selon les projections, elle ne cessera de progresser à un rythme plus élevé que les autres cancers d'ici à 2025. En cause, le vieillissement de la population, mais aussi la difficulté des Belges à intégrer les réflexes élémentaires de protection de leur enveloppe corporelle. Le mélanome, la forme la plus redoutable de cancer de la peau, devrait selon toute probabilité augmenter, d'ici à 2025, de 58% chez les hommes et de 43% chez les femmes.

La sécu malmenée

Ensuite, sur le plan financier. Selon une thèse présentée en 2016 à l'Université de Gand, le coût des différentes formes de cancer de la peau devrait exploser dans les vingt années à venir. Évalué à 107 millions d'euros en 2014, il passerait à plus de 3 milliards d'euros en 2034 !

La sophistication croissante des prises en charge thérapeutiques (avec, à la clef, des guérisons de plus en plus nombreuses) est l'une des explications à cette hausse spectaculaire, mais l'effet "boule de neige" en est une autre : après avoir contracté un mélanome, un patient court 12 à 15 fois plus de risques d'en développer un deuxième, et 4 à 6 fois plus de développer d'autres formes de cancers de la peau (carcinome basocellulaire et carcinome épidermoïde). Ces dernières, heureusement, se soignent le plus souvent avec succès.

Un contre-discours difficile

Pour taper sur le clou de la prévention, Euromelanoma organise, du 14 au 18 mai, sa vingtième campagne internationale de dépistage gratuit. Avec, en filigranes, l'invitation lancée au public à respecter quelques consignes, simples à énoncer mais parfois plus difficiles à respecter dans un pays où le discours ambiant a tendance à survaloriser les bienfaits du soleil. Lesquelles ? Rester le plus souvent possible à l'ombre et couvrir sa peau par des vêtements longs. En cas d'exposition assumée, enduire celle-ci d'une crème solaire non-périmée, tout en réduisant au strict minimum la durée de cette exposition, surtout celle des enfants.

Sans oublier, bien sûr, le réflexe d'observer régulièrement son propre corps (lire ci-dessous). Car, s'il est un message réconfortant à faire passer, c'est bien celui-là : s'il est diagnostiqué à temps, le cancer de la peau − y compris, dans une certaine mesure, le mélanome − a davantage de chances d'être traité avec efficacité et d'aboutir à une guérison.

Dépistage gratuit

Du 14 au 18 mai, 150 dermatologues belges organiseront un dépistage gratuit du mélanome. Il faut s'inscrire préalablement sur www.euromelanoma.org. Pour conserver pleinement la dimension préventive escomptée, cette opération "grand public" s'adresse exclusivement aux personnes qui n'ont pas participé en 2017. À l'heure où ces lignes sont écrites, les plages horaires des dermatologues bénévoles sont déjà bien remplies, excepté dans de rares localités.

Le conseil est donc de prendre un rendezvous payant à un autre moment, si possible chez un dermatologue conventionné (s'en informer lors de la prise du rendez-vous et consulter www.mc.be). La consultation coûte alors 28,90 euros, dont 12 euros sont à la charge du patient (3 euros en cas d'intervention majorée). Ces montants peuvent être supérieurs si un acte technique est posé par le dermatologue.