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Reconnaître et soutenir les aidants proches

Reconnaître et soutenir les aidants proches © M. Detiffe

Près d'un million de Belges prennent soin quotidiennement d’un proche en perte d’autonomie. C'est indéniable, les aidants proches jouent un rôle essentiel. Pourtant, ils bénéficient de peu de reconnaissance et de droits spécifiques. La MC et ses partenaires demandent dès lors aux autorités publiques de prendre des mesures en ce sens. Plus de 30.000 personnes ont signé la pétition remise à la ministre fédérale de la Santé ce lundi 20 mai.


On ne s’en rend pas toujours compte mais, en Belgique, un nombre très élevé d'adultes mais aussi de jeunes sont des "aidants proches". Il s’agit de personnes – un conjoint, un enfant, un parent, un ami, une connaissance, un voisin… – qui, par choix et/ou par la force des choses, consacrent quotidiennement plusieurs heures à un membre de la famille ou de l'entourage… Ces aidants proches apportent une aide informelle inestimable. Bien souvent, ce rôle, même s'il est gratifiant, les oblige à mettre entre parenthèses leur vie personnelle, professionnelle et sociale. 

Cette réalité est malheureusement trop souvent sous-estimée, voire méconnue. Mais sans tous ces aidants naturels, la société ne pourrait pas faire face aux besoins – croissants – de soins et d'accompagnement des personnes fragilisées par l'âge, le handicap ou la maladie chronique. Par ailleurs, l’énorme majorité des aidants proches a elle-même des besoins spécifiques. Ces besoins sont cependant peu pris en considération par les politiques développées en matière de soins de santé ou de santé au sens large. 

Un besoin de reconnaissance

Il y a des années que les aidants proches attendent une reconnaissance à la mesure de leurs engagements et de leurs efforts. Certes, depuis 2014, ils "existent" officiellement dans une loi. Mais celle-ci est restée jusqu'ici une coquille vide, sans avancée sur le terrain. En avril dernier – enfin – une loi a été adoptée qui identifie de quelle manière chaque aidant peut se faire reconnaitre comme tel. La référence antérieure à la "grande" dépendance a été sup­primée, permettant ainsi à tous les aidants proches de faire l’objet d’une reconnaissance et ce, quel que soit le niveau de dépendance de la personne aidée. Cette reconnaissance se fera via les services sociaux des mutualités. L'entrée en vigueur de cette loi est prévue en octobre prochain.

La nouvelle loi permettra aussi aux aidants proches reconnus de prendre un congé pour assistance médicale plus long (d'un à six mois). Actuellement d'une durée d'un an à temps plein, ce congé est indemnisé par l’Onem et assimilé pour la pension. L’entrée en vigueur aura lieu progressivement. Un mois viendra s’ajouter chaque année. 

Certes, on peut se réjouir des avancées apportées par cette loi. Mais elles sont loin d'être suffisantes en regard des besoins des aidants et des défis liés au vieillissement de la population et des besoins croissants qui y sont liés, en termes d’aide et de soins…

Écoute, accompagnement et répit

Il est démontré aujourd’hui que le soutien et l'accompagnement d'un proche peut avoir un impact sur la propre santé des aidants, surtout dans les situations où l’aide s’avère intensive ou du fait de l’avancée en âge de l’aidant proche lui-même. S'occuper d'un proche représente une charge physique et mentale importante. Il n’est pas possible de s’occuper d’un proche sans sas de décompression ni  de rester auprès de lui 24h sur 24h et 7 jours sur 7. Dès lors, nous plaidons pour développer et soutenir les initiatives visant un meilleur accompagnement psychologique et social des aidants. Il faut aussi renforcer et diversifier l'offre de répit comme par exemple les possibilités de court séjour dans des structures d’hébergement et de convalescence adaptées aux besoins de la personne aidée et de son aidant…

Nous plaidons également pour l’amélioration de l’accessibilité financière de tous les services d’aides et de soins à domicile pour répondre aux besoins des personnes en perte d’autonomie. Il nous semble indispensable, dans ce cadre, de financer et développer les gardes, en particulier celles de nuit. 

Instaurer enfin une assurance autonomie

Aujourd’hui, 11,6% de la population wallonne est âgée de plus de 67 ans et ce pourcentage devrait atteindre 22,4% d’ici 2030, soit près du double. Ce vieillissement de la population entrainera une augmentation considérable du nombre de situations de dépendance et par conséquent des besoins en termes d’aide et de soins.

Nous devons opérer un virage radical pour assurer une prise en charge à domicile des futures personnes en perte d’autonomie. En d’autres mots, des soins sur mesure, une aide et des soins dans le bon lieu et au bon moment, tout en respectant autant que possible la liberté de choix de la personne dépendante et celle de ses aidants proches.

La Flandre a son assurance autonomie depuis 2001. Si le projet de décret avait pu être adopté, l’assurance autonomie aurait pu être opérationnelle dès 2021 en Wallonie. Combien d’années de retard allons-nous encore accumuler ? La prochaine législature sera cruciale.

Pour soutenir les aidants proches, l'ensemble des acteurs de la santé et du social doivent aussi travailler main dans la main : mutualités, médecins, personnel des services à domicile, travailleurs sociaux… Il importe d’accompagner les personnes en perte d'autonomie pour les orienter au plus tôt vers les dispositifs qui leur sont dédiés.