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Médecins et mutualités signent un accord pour deux ans

Médecins et mutualités signent un accord pour deux ans © Matthieu Cornélis

Les mutualités et les médecins ont réussi à conclure un accord sur les tarifs médicaux pour 2016 et 2017. Avec une réelle vision d’avenir en matière de politique de santé et ce, malgré des moyens budgétaires limités. Au rang des bonnes nouvelles : les médecins ne pourront plus facturer de suppléments d’honoraires en chambre individuelle aux patients pour certaines prestations. Et l’accessibilité financière des soins est améliorée pour les malades chroniques...


Chaque année au mois de décembre, médecins et mutualités négocient pour conclure un accord fixant les honoraires et les tarifs pour l’année suivante. Cet accord donne l'assurance aux patients qui consultent un médecin conventionné que les tarifs négociés seront respectés par le prestataire. Cela s’appelle la sécurité tarifaire. Sans accord, les tarifs seraient libres et l’accès aux soins limité. Le budget disponible pour conclure un nouvel accord pour 2016 était réduit : 25 millions d'euros sur un total de 7,8 milliards d'euros que représentent la masse totale des honoraires médicaux. Malgré cette faible marge et conscients de la situation budgétaire difficile, médecins et mutualités se sont accordés.

L’accès aux soins amélioré

La conclusion d’un accord médico-mutualiste comporte en lui-même une bonne nouvelle pour les patients : la sécurité tarifaire chez les médecins conventionnés. Mais cette fois, plusieurs dispositions vont renforcer cette sécurité tarifaire. Tout d'abord, l’accord prévoit de promouvoir l’adhésion et le respect des accords par les médecins conventionnés. Ensuite, il a été convenu que les suppléments d’honoraires pour certains actes techniques réalisés sans qu’il y ait eu contact entre le patient et le prestataire seront interdits. Sont visées les prestations en biologie clinique, en anatomopathologie et en génétique.

De plus, en cas d’hospitalisation en chambre individuelle ou de traitements ambulatoires coûteux, les médecins remettront au patient une estimation préalable des suppléments d’honoraires. Cette estimation fera office d’engagement envers le patient.

Par ailleurs, un budget de 2,4 millions d'euros est réservé pour améliorer l’accessibilité des malades chroniques aux soins de première ligne. Enfin, médecins et mutualités mettent pour la première fois en discussion le lien entre les suppléments d’honoraires et le choix de la chambre individuelle. Un choix de plus en plus courant et qui ne légitime pas en soi la pratique des suppléments d'honoraires. La MC, tout en soutenant bien sûr un financement correct des hôpitaux et des médecins, réclame que celui-ci soit transparent et que des critères pertinents soient définis pour justifier des suppléments d'honoraires.

Avec une vision d’avenir

L’accord contient également une série de propositions qui ouvrent les perspectives d'une politique de santé à long terme. Celle-ci faisait défaut, ces derniers mois. Ainsi, le rôle central du médecin généraliste dans la prévention, le traitement et l’orientation du patient est renforcé. Exemple avec le dossier médical global (DMG) des patients chroniques âgés entre 45 et 74 ans. Il est sensiblement revalorisé pour le médecin. Ces patients demandent en effet souvent plus de temps et de suivi. Autre élément important pour exercer cette fonction centrale : les outils informatiques et leur intégration dans la pratique médicale. L’accord prévoit des incitants afin de soutenir l’utilisation des services e-santé par les prestataires de soins.

Parmi les avancées de l'accord, on notera également l’interdisciplinarité et la multidisciplinarité. Elles sont encouragées, spécialement pour les soins des patients diabétiques et pour la réintégration au travail des personnes en incapacité de travail. De collaboration, il est aussi question en matière de garde médicale. Compte tenu de l’évolution des pratiques et de l’offre de prestataires, l’organisation de la permanence des soins devient un défi majeur. Les services de garde et postes de garde de médecine générale doivent collaborer avec les services d’urgence des hôpitaux dans un modèle intégré. Un groupe de travail spécifique est chargé de formuler des propositions concrètes dès 2016, après un audit externe des postes de garde médicale. Enfin un budget spécifique a été réservé pour rembourser plusieurs nouvelles techniques et traitements innovants.

Et maintenant, le défi de la mise en œuvre

Pour que l’accord signé entre les représentants des médecins et des mutualités entre en vigueur, il doit recueillir l’adhésion d’au moins 60 % des médecins. Un médecin qui adhère est un médecin conventionné : il s’engage à respecter les tarifs négociés et bénéficie annuellement - s’il est complètement conventionné - d’un montant annuel de 4.790 euros pour sa pension complémentaire. Le budget total prévu en 2016 pour ces compléments est de 193 millions d'euros. Vu les taux de conventionnement des années précédentes, on peut espérer atteindre un taux d’adhésion globalement supérieur au minimum requis.

Précisons que, derrière le taux global d’adhésion, se cachent cependant quelques grandes variations. Ainsi chez les dermatologues, les ophtalmologues et les gynécologues, le taux de conventionnement n’atteint même plus 50%, ce qui est inquiétant. Les patients n’ont pas de garantie quant aux tarifs, chez les spécialistes non conventionnés. Nous espérons une augmentation du taux de conventionnement notamment des gynécologues. En effet, dans l’accord signé, sept millions d'euros ont été réservés à la revalorisation des honoraires pour les accouchements pratiqués en urgence.

L'accord est un fameux défi. Il nécessitera adhésion, groupes de travail, changements légaux et réglementaires, modifications tarifaires pour que les promesses et les engagements se concrétisent. Mais, il est aussi une formidable opportunité… porteuse de perspectives d’avenir et de meilleurs accès aux soins. Avec la bonne volonté de tous pour le mettre en œuvre, 2016 et 2017 s’annoncent prometteurs. À tous et à chacun, simplement et avec envie, bonne année et bonne santé.