Adapter le paysage hospitalier aux besoins
La ministre de la Santé au Fédéral, Maggie De Block veut radicalement modifier l'offre hospitalière : des 110 hôpitaux de soins aigus existants, elle souhaite faire 25 entités, mettant en réseau les cliniques. On parle de rationalisation, de fermeture, de centralisation… Un vrai chamboulement de tout le paysage et des soins hospitaliers. Est-ce nécessaire ? Est-ce mieux pour le patient ?
L'évolution des techniques médicales, le vieillissement de la population et le nombre croissant de malades chroniques laissent penser qu'une offre hospitalière aiguë abondante ne sera sans doute pas la réponse la plus adéquate à nos besoins de soins dans l'avenir. Ceci semble plaider en faveur d'une nouvelle organisation de l'offre hospitalière en articulation avec les soins ambulatoires.
La formule choisie par la Ministre
La Ministre veut que tous les hôpitaux se regroupent pour former 25 réseaux locaux régionaux couvrant l'ensemble de la Belgique et desservant chacun de 400.000 à 500.000 personnes. Chaque réseau "locorégional" devrait offrir tous les services de base de manière accessible. Certains types de soins plus spécialisés tels que la radiothérapie ou la prise en charge de pathologies rares devraient être organisés de manière suprarégionale. Ces services dits de référence ne seraient disponibles qu'en nombre limité. Les réseaux hospitaliers locaux régionaux devraient conclure des accords de coopération avec ces services de référence. L'intention ministérielle est que les réseaux locaux régionaux se soient formés d'ici 2018. Ils devraient être avalisés ensuite par la conférence interministérielle Santé publique qui réunit l'ensemble des ministres de la Santé du pays (du fédéral, des Régions et des Communautés). En forçant les hôpitaux à coopérer au sein d'un réseau, la Ministre De Block vise une certaine rationalisation de l'offre. De notre point de vue, si réduire la dispersion actuelle des centres de soins spécialisés entraîne une plus grande qualité de soins du fait d'une expertise accrue, nous y sommes favorables.
Exigences et conditions de succès
Certes, la mise en réseau permet une approche intégrée positive pour les soins de santé.
Mais attention à la liberté de choix du patient. Elle doit être garantie. Ainsi ce redéploiement hospitalier ne peut se faire qu'à certaines conditions :
- les services hospitaliers de base doivent être bien répartis au sein du réseau "locorégional" ;
- le déplacement des patients vers les centres de référence doit être organisé et pris en charge ;
- le regroupement des hôpitaux ne peut pas donner lieu à un ajustement vers le haut des suppléments d'honoraires ;
- l'évaluation systématique de la qualité des soins doit être organisée dès le début sur la base d'indicateurs communs...
Afin de tenir compte de certaines réalités locales et régionales, nous souhaiterions voir de la souplesse dans le schéma ministériel. Et ce, tant sur le nombre de réseaux attendus que sur le nombre d'habitants estimé pour chacun d'entre eux. Par ailleurs, la stabilité budgétaire est essentielle pour la réussite d'un réseau "locorégional". Enfin, le calendrier ministériel nous apparaît bien trop serré pour effectuer ce redéploiement. Nous lui suggérons de prévoir un délai plus raisonnable (trois à cinq ans) pour une mise en œuvre effective.
Des hôpitaux partenaires et non concurrents
Plus globalement, une approche territoriale des soins de santé doit correspondre à un bas sin de vie de manière homogène et couvrir l'ensemble des besoins (soins aigus hospitaliers, soins chroniques, soins de revalidation, première ligne…) dans une continuité organisée. Il n'est pas question de supprimer purement et simplement des lits hospitaliers. Ces lits aigus devraient être reconvertis en lits de revalidation et de convalescence dans des structures intermédiaires et en lits résidentiels pour les personnes âgées. Il faut aussi renforcer les soins et l'accompagnement en ambulatoire (soins à domicile, suivi postnatal par des sages-femmes...). On perçoit tout l'enjeu de la collaboration, de la complémentarité. Entre hôpitaux également. Il est nécessaire que les hôpitaux, publics et privés, situés dans un même territoire collaborent. À cette fin, le cadre juridique doit être adapté pour permettre des formules souples, encourageant l’intégration et respectueuses des réalités locales. Il appartient aux entités fédérées (Région bruxelloise, Wallonie, Communauté flamande, Communauté française et Communauté germanophone) de définir ce cadre légal. C'est un enjeu fondamental pour que tous les hôpitaux collaborent en mettant le patient et l'intérêt général au centre, qu'ils soient partenaires et non concurrents.
La réorganisation du paysage hospitalier en réseaux peut être porteuse d'une certaine rationalisation et d'une amélioration de la qualité des soins pour les patients. Moyennant certaines conditions d'accessibilité, notamment. Elle nécessite aussi l'engagement des Communautés et des Régions pour promouvoir la collaboration de tous les hôpitaux, publics et privés, au service du patient et de l'intérêt général.
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