Médias

Invincible malaria

2 min.
© Coopération internationale
© Coopération internationale
Philippe Lamotte

Philippe Lamotte

Depuis une dizaine d'années, le paludisme (ou malaria) connaît une régression assez spectaculaire. Cette maladie infectieuse n'en reste pas moins un fléau responsable de près de 500.000 décès annuels dans le monde, parmi lesquels 70% d'enfants de moins de cinq ans. Neuf décès sur dix ont lieu en Afrique, mais la maladie sévit également en Asie et en Amérique du Sud ; en fait, dans toutes les zones tropicales où est actif le moustique anophèle, capable de transmettre le parasite responsable de la maladie (le Plasmodium) par ses piqûres.

Une tisane miraculeuse

Si le paludisme fait parler de lui, ce n'est pas seulement à cause de son impact sanitaire considérable, principalement dans les pays en développement. C'est aussi parce que le parasite donne des signes de plus en plus inquiétants de résistance aux médicaments traditionnellement utilisés contre lui, et particulièrement à l'artémisinine, la substance active extraite d'une plante nommée l'Armoise (Artemisia annua). Face à ce constat, des voix de plus en plus nombreuses - y compris dans le monde scientifique spécialisé dans ce domaine - visent à (re)-mettre à l'honneur les vertus de l'Artemisia, non plus sous la forme médicamenteuse mais celle de simples feuilles séchées consommées en tisane. Nettement plus accessible financièrement par les populations les plus frappées, cette voie s'avère aussi une importante source de développement dans le Sud.

Stromae malade

Dans Malaria Business, le réalisateur Bernard Crutzen donne largement la parole aux acteurs (agriculteurs, médecins, chercheurs...) concernés par cette évolution. Avant même sa projection, son documentaire a fait parler de lui en raison d'une apparition éclair du chanteur Stromae , évoquant ses pensées suicidaires (effets secondaires) suite à la consommation d'un médicament préventif anti-malaria. L'intérêt principal du film est évidemment ailleurs. Partout dans le monde, des ONG, mais aussi des équipes scientifiques reconnues (et jusqu'à l'Université de Liège) ont étudié de près les propriétés thérapeutiques de diverses variétés d'Artemisia. Elles ont mis en lumière des qualités thérapeutiques évidentes qui, pourtant, restent contestées par l'Organisation mondiale de la santé (OMS), rivée aux moyens de lutte habituels (médicaments, moustiquaires, pesticides) et aux promesses de vaccins.

La recherche en question

Riche en images d'archives étonnantes (notamment sur les moyens de luttes anti-malaria pendant la guerre du Vietnam), le documentaire nous promène - nombreuses interviews à la clé - aux quatre coins de la planète, là où s'étudient et se cultivent diverses variétés d'Artemisia. Là où, aussi, le végétal sous forme de boisson prévient et soigne la malaria, bénéficiant même du soutien officiel de nombreux gouvernements de pays tropicaux. Malaria Business a l'intelligence de ne pas verser dans le manichéisme "Big pharma contre petits producteurs". Et, en évoquant notamment la stratégie ambiguë d'organismes comme la Fondation Bill et Melinda Gates, d'inviter à s'interroger sur le financement de la recherche pharmaceutique, sa lenteur, sa fragilité, sa soumission à divers intérêts tant privés que gouvernementaux.

Pour en savoir plus ...

Malaria Business (avec la voix de Juliette Binoche) sera diffusé sur la Une (RTBF) le jeudi 11 janvier à 22 h 15.