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Cauchemars à la chaîne

2 min.
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Mathieu Stassart

Mathieu Stassart

Ils sont chômeur, médecin, caissier, ingénieur, caissier, employé d'assurance… Tous racontent puis analysent le souvenir d'un rêve lié à leur travail. Leurs récits laissent transparaitre un environnement professionnel source de malaise et de souffrance. Rêver sous le capitalisme s'ouvre sur un pan de ciel noir. Le halo de la lune éclaire maigrement les nuages d'une nuit opaque. Puis arrive le va-et-vient des trains en gare du Nord. "Je travaillais, c’était une fin d’après-midi, et puis la nuit commençait à tomber, ça devait être en hiver. Je me suis aperçu que quelques collègues s’étaient transformés. (…) ils ressemblaient presque plus à des morts vivants qu’à des collègues. (…) Si je devais relier ça à l’ambiance du boulot, effectivement, il y a une espèce d’am - bian ce diffuse, de malaise. (…) une espèce de fin de règne comme ça…"

Les témoignages se succèdent, sur fond de plans fixes. Un vol d'oiseaux sur le parking d'un supermarché, le ballet de navetteurs qui entrent et sortent de la gare du Nord, des bureaux filmés de jour ou de nuit, parfois le témoin lui-même, dans son bureau. Ces images a priori banales révèlent rapidement leur caractère hypnotique. Elles fonctionnent comme un fond visuel qui offre toute l'attention à ces voix qui se racontent.

On pourrait vite se lasser de ce film lent, presque immobile. Au contraire, la quasi-absence de mouvement, couplée à l'intrigante bande sonore du film emportent entièrement dans les récits des conteurs. Ces témoins, qui analysent leurs propres songes, racontent leur expérience toute subjective du monde du travail. Ce faisant, ils montrent à quel point le système capitaliste peut s'immiscer jusque dans les recoins les plus secrets de nos êtres.

Le cinéma pour raconter

Sur les raisons qui l'ont poussées à faire ce film, Sophie Bruneau explique : "Le travail est central dans nos vies. Il participe à notre transformation, émancipation, aliénation, et il s’agit de pouvoir comprendre ce qui nous arrive : analyser les organisations de travail, par exemple, et révéler pourquoi elles peuvent créer des souffrances indues. Le cinéma, dans sa capacité à raconter et à nous déplacer, peut dessiller les esprits. Ici, il porte une dimension critique nécessaire car on assiste à une déstructuration de beaucoup d’hommes et de femmes par le travail".

Projections

  • Les 14, 17, 26 septembre et 6 octobre à Bruxelles (Aventure)
  • Le 18 septembre à Liège (Les Grignoux)
  • Le 19 septembre à Mons (Plaza Art)
  • Le 20 septembre à Namur (Caméo)
En télévision
  • RTBF : le 24 septembre à 21h05
  • Arte : le 8 octobre

Pour en savoir plus ...

Rêver sous le capitalisme • Sophie Bruneau • 63 minutes • sortie en salles le 12 septembre