Alimentation

Pourquoi mangeons-nous mal ? 

3 min.
Candice Leblanc

Candice Leblanc

Maladies cardiovasculaires, diabète, obésité… Ces maux, en constante augmentation dans le monde, sont en grande partie causée par une alimentation trop sucrée, trop salée, trop grasse. "Que ton aliment soit ton médicament", conseillait pourtant Hippocrate, célèbre médecin grec de l'Antiquité. Vingt-cinq siècles plus tard, c'est plus vrai que jamais ! Nous sommes nombreux à en avoir conscience, à vouloir améliorer nos habitudes alimentaires et les inculquer à nos enfants. Mais, dans la pratique, bien souvent, nous n'y arrivons pas. Pire, nous consommons trop d'aliments ultra-transformés (1). Mais quels sont ces obstacles qui se dressent entre nous et une alimentation saine ?  

Manque de temps… et d’idées 

Le manque de temps est l’argument le plus fréquemment avancé. Il semble plus rapide de mettre une pizza surgelée au four plutôt que de cuisiner un vrai repas… ce qui, chrono en main, n’est pas forcément vrai ! "C’est surtout une question de priorité, estime Emanuela Garau, psychologue clinicienne et nutrithérapeute. Nous accordons de moins en moins de temps à la nourriture au sens large. Or, il n’y pas de secret : une alimentation variée et équilibrée demande un minimum d’organisation et de cuisine."  

Parfois, ce n’est pas seulement le temps qui manque, mais aussi les idées. Nous ne savons pas très bien quoi cuisiner, alors nous mangeons toujours la même chose. Pourtant, nous avons à disposition des millions de recettes dans des livres et sur internet ! Mieux : un nombre croissant d’entreprises et de supermarchés proposent des recettes en kit, avec tous les ingrédients nécessaires et en bonnes proportions.  

Essayer de nouveaux plats exige toutefois de sortir de sa zone de confort et cela peut être perçu comme une charge mentale en plus. Mais au lieu de voir l’exploration culinaire comme une contrainte, pourquoi ne pas l’envisager comme une aventure ? Emanuela Garau en est certaine : "C’est en faisant preuve d’ouverture et de curiosité que l’on peut, de façon ludique et joyeuse, découvrir de nouvelles saveurs et (ré)apprendre à les apprécier !"    

Culture, dogmes et habitudes alimentaires  

Mais les vieilles habitudes ont la peau dure et viennent parfois de loin. "Nous sommes conditionnés par notre culture familiale et certains dogmes alimentaires, explique la psychologue. Par exemple, cette injonction de faire un repas froid et un repas chaud par jour… Alors que nous pouvons très bien faire deux repas chauds ou deux repas froids, en fonction de nos envies ou de la météo ! Ne sous-estimons pas non plus notre tendance à choisir des nourritures palatables, c’est-à-dire des aliments – souvent ultra-transformés – dont le goût et/ou la texture sont agréables au palais. Quand nous y sommes habitués, il est moins facile d’aller vers les légumes, par exemple, dont les saveurs sont plus subtiles." Il existe pourtant mille et une façons savoureuses d’accommoder et assaisonner les légumes : épices, fines herbes, ail, moutarde, sauce tomate, pesto, tapenade, etc. Il suffit d'oser !  

Le coût, un faux argument ? 

D’aucuns dénoncent le coût prohibitif de la nourriture saine. Ils n’ont pas complètement tort. D’après une enquête menée par Sciensano et l’École de Santé publique de l’ULB (2), les aliments ultra-transformés coûtent 0,55 €/100 kcal alors que les aliments peu ou pas transformés reviennent à 1,29 €/100 kcal. Plus du double, donc. Selon Emanuela Garau, cette différence est à relativiser. "Les aliments ultra-transformés sont des calories 'vides' : sur le plan nutritionnel, ils n’apportent pas grand-chose et sont très peu rassasiants. Il faut donc en manger de plus grandes quantités et plus souvent pour atteindre la satiété." Y renoncer au profit d'aliments plus sains n'est donc pas forcément plus cher et, à long terme, permet d'économiser sur une autre facture, nettement plus salée : celle des problèmes de santé causés par une alimentation déséquilibrée…